Histoire YEMA – Partie I
Henry-Louis BELMONT
Le destin d’un homme
Article mis à jour le 03/09/19. Mises à jour repérables par le code couleur (Mise à jour précédente le 30/11/2019)
Par R.C. alias JERRY
Préambule
En 2008, à l’occasion du lancement de la marque YEMA Maison horlogère française 1948 et de la présentation au salon de Bâle d’avril de la Master Elements, produite à 60 exemplaires pour fêter le 60ème anniversaire de la marque, le service de communication produit un kit de presse contenant une rétrospective couvrant les année 1948 à 2008. C’est très souvent ce document qui est à la source – en mode « copier coller » – des « sagas Yema » disponibles sur internet.
J’ai voulu en savoir plus.
La toile étant une source inépuisable d’informations, elle permet de sortir un peu des sentiers battus pour jouer au petit détective, trouver des pièces du puzzle, et tenter de donner une image d’ensemble malgré les nombreux espaces vides. Vous allez voir, cette remontée dans le temps est passionnante. Voici donc « mon » histoire Yema.
Elle est très imparfaite évidemment. Il ne s’agit pas d’un travail d’universitaire. En me lançant dans cette rétrospective il y a quelques semaines, je connaissais peu de choses sur le sujet. Les plus férus de l’histoire de l’horlogerie apprendront sans doute peu et repèreront rapidement les lacunes. Les plus assidus sur les forums horlogers reconnaitront des sources déjà vues. Vous constatez une erreur ? Un oubli majeur ? Vous avez des infos complémentaires ? N’hésitez pas à me le faire savoir en postant vos commentaires ici ou sur la page Facebook du Club Yema.
J’indique de la façon la plus explicite possible les sources d’information, avec le lien permettant d’y accéder directement lorsqu’elles sont disponibles sur internet. Ne vous privez pas de lire les notes en fin de document. Des « sous histoire » y sont parfois développées ou ébauchées, des vidéos sont à regarder. Elles n’ont pas été intégrées au texte maître pour éviter une trop grande dispersion. J’ai parfois (rarement) emprunté des visuels sur des sites ou forums horlogers. Il n’est pas toujours facile de communiquer avec les auteurs. Si vous reconnaissez votre photo et souhaitez qu’elle soit retirée ou qu’une mention particulière de » crédit » soit ajoutée, n’hésitez pas à me le signaler.
Enfin, je remercie particulièrement le Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon, Madame Anne Lescalier, professeur d’histoire-géographie au Lycée Jules Haag et l’association Vivre aux Chaprais pour leur disponibilité et les informations auxquelles ils m’ont donné accès.
Bonne lecture !
Jerry
Henry-Louis Belmont
Henri Louis Blum, fils d’horloger, petit fils d’horloger
L’histoire commence par un extrait du registre d’État civil de Besançon. Un acte de mariage. Celui de monsieur Henri Louis Blum, horloger, avec mademoiselle Berthe Gysel, employée de commerce le 16 juillet 1910[1]. Le registre d’état civil précise que le père du marié se prénomme également Henri Louis, et a pour profession … horloger, métier qu’il exerce (très probablement) à Schaffouse en Suisse, où il réside avec son épouse. Le 6 décembre 1912, à Besançon, Berthe donne naissance à un garçon. Les jeunes parents âgés respectivement de vingt-neuf et vingt-quatre ans, prénomment leur fils…Henri Louis. Chez les Blum, prénom et profession se transmettent de père en fils !
Henry-Louis Belmont
Le registre d’état civil, reproduit ci-dessous[2], indique également que Henri Louis Blum a été autorisé par décret du 20 septembre 1966 à porter le nom de Belmont. Mes investigations ne m’ont malheureusement pas permis de connaître les motifs et les circonstances de ce changement de nom. Pas plus d’ailleurs que les raisons du changement d’orthographe de son prénom dans le temps, de Henri à Henry avec un « y ». La découverte, tardive, de l’acte de naissance du jeune Henri Louis Blum a cependant définitivement clos pour moi la recherche d’explications concernant la grande variété d’orthographe du prénom et du nom du personnage central de cette histoire, l’essentiel étant résolu.[3]
Pour la suite de ce récit, je conserverai la logique chronologique d’orthographe du nom et du prénom.
L’école d’horlogerie
Sur les traces de son père, Henri Louis s’engage dans la voie de l’horlogerie. Il entre à 16 ans à l’École Nationale d’Horlogerie de Besançon.
Familièrement appelée « L’Horlo » par les élèves, cette école est née en 1862, place de la Révolution (également appelée place du Marché) dans l’ancien « Grenier d’abondance » construit de 1720 à 1726. Le bâtiment, construit sur 4 niveaux, totalisait 2000 m2 de plancher. Elle y restera jusqu’en 1933. Le bâtiment sera alors transformé en école de musique et d’expression artistique, et nommé le Conservatoire. L’école d’horlogerie sera alors transférée dans un bâtiment art déco flambant neuf, inauguré le 2 juillet 1933 par le président Albert Lebrun[4]. Il deviendra l’actuel Lycée Jules-Haag[5] en 1974, perdant ses liens avec l’horlogerie, hormis l’inscription gravée sur son fronton. Les horlogers seront désormais formés à Morteau. Ils le sont encore aujourd’hui. Je vous invite à jeter un œil sur le riche patrimoine documentaire qui lui est consacré[6].
Président de l’Association Amicale des Anciens Eleves
L’Ecole Nationale d’Horlogerie comptera beaucoup pour Henri Louis. Il lui restera très attaché, d’abord comme membre actif de l’Association Amicale des Anciens Elèves (A.A.A.E.) dont il sera président pendant près de neuf ans, jusqu’en 1957[7].
Un horloger brillant
A l’occasion de sa nomination, le secrétaire général dresse dans le bulletin de l’association un portrait du jeune homme, flatteur et très instructif sur les débuts de sa carrière professionnelle[8]
« Henri BLUM entre à l’école, section horlogerie, en 1927, il en sort major avec médaille d’argent, en 1931. Il se perfectionne alors deux ans dans l’atelier de son père (car il est fils et petit-fils d’horloger). Puis c’est le service militaire, il est sergent dans les chars d’assaut. Sa carrière commence alors quand il entre aux usines LIP en 1935. Successivement il passe aux services : décolletage, fournitures, approvisionnement, il organise le service contrôle, atelier de montage des grandes pièces.
En 1930 il est chef de fabrication, en 1941 il est encore chef de fabrication aux usines SAPROLIP [ndlr : usines spécialisées dans l’armement] à Issoudoun puis à Valence en 1942. Il revient toujours comme chef de fabrication chez LIP, en 1942. En 1943, en plus de cette même fonction, il a toute la responsabilité du département technique. Enfin, en 1944 il devient directeur de la production et, en 1946, il est Directeur technique des usines LIP. »
Major ou vice Major ?
Claude Briselance, dans sa thèse de 2015 sur les écoles d’horlogerie de Besançon, confirme, en s’appuyant sur le registre d’inscription des élèves, qu’Henri Blum est sorti « vice major » de sa promotion, la première place avec la médaille d’or étant obtenue Albert Dessay[9]. Ces deux sources apportent donc une précision intéressante par rapport à l’information plus souvent répandue d’un « Henri Blum, major de promotion ». Il existe toutefois entre elles un petit désaccord de dates, Claude Briselance situant la scolarité d’Henri Blum de 1927 à 1930 (et non 1931).
Idée reçue : Henri Blum n’a pas fait d’école de commerce !
Le site internet Watchnonista, partenaire officiel du prix Gaïa sur lequel nous reviendrons plus loin, évoque des études commerciales effectuées par Henri Blum[10]. C’est une erreur d’interprétation : il s’agit en fait de l’E.P.S de Besançon, Ecole primaire supérieure, ordre particulier d’enseignement ayant existé en France entre 1833 et 1941, suivi par les élèves après école primaire. Les E.P.S. sont placées en 1892 sous la tutelle du ministère du Commerce et de l’Industrie sous le nom d’écoles pratiques du commerce et de l’industrie (E.P.C.I.)[10b]
La seconde guerre mondiale
La solidarité de l’A.A.A.
Pendant la seconde guerre mondiale, l’amicale des anciens élèves fera preuve d’esprit de corps, comme en témoigne ce point d’Henri Blum, rédigé pour le N°1 de l’année 1945 du Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Elèves[11]. Vous noterez les années de scolarité à côté de son nom :
La solidarité des membres l’association est confirmée par un autre propos d’Henri Blum, rapporté par Claude Briselance : « A cette époque (sous l’occupation), notre association poursuit son activité à un rythme réduit, et grâce à son président, Maurice Huguenin, elle trouve refuge à la Générale Or, rue Gambetta à Besançon. Le but essentiel de ces réunions : se retrouver entre amis et collecter les fonds nécessaires à l’envoi de colis à nos camarades prisonniers en Allemagne.(…) »[12]
Ses publications dans le bulletin seront nombreuses, éditoriaux, partage d’impressions de voyage dans les pays étrangers au sortir de la guerre, nouvelles des membres de l’association…[13]
Plus tard ensuite, il privilégiera les recrutements au sein de l’école après avoir créé sa propre entreprise.
Henri Louis Blum, témoin de la libération de Besançon
Henri Louis Blum a par ailleurs été, au travers de ses photos, un témoin privilégié de la libération de Besançon en septembre 1944. Selon les sources, les clichés sont attribués à Henri Belmont ou à Henri Blum. Pas facile de s’y retrouver. Nul doute néanmoins que l’attribution correcte du point de vue strictement chronologique est bien Henri Blum. Le second prénom, Henry ou Henri, n’est pas toujours repris. Certaines photos du jeune homme sont consultables sur la photothèque du site de la ville de Besançon[14]. En voici deux qui n’y figurent pas. Elles m’ont été confiées par le Musée de la Résistance de Besançon.
Henri-Louis Blum membre des FFI ?
Un article de l’Est Républicain du 6 juillet 2013 mentionne l’appartenance d’Henri Louis Blum aux FFI[15]. Contacté, le Musée de la Résistance de Besançon n’a pas été en mesure de confirmer cette information, ne disposant apparemment d’aucun élément concernant l’action éventuelle d’Henri Louis Blum dans la résistance. Il semble toutefois admis qu’il s’y est bien engagé.
La création de YEMA
Les débuts
En 1948, Henri Louis Blum se lance avec une toute petite équipe de jeunes horlogers, tout juste diplômés des écoles d’horlogerie pour créer YEMA. Aujourd’hui, on appellerait cela une start-up. L’entreprise, avec un effectif de 5 personnes installe son atelier rue Paul Bert[16], au numéro 3, à en juger par un document de prospection du département export édité pour promouvoir la collection de 1961[17].
Cette information est confirmée par des des factures de 1952 et 1960, présentées un peu plus loin. Il existe au cadastre de Besançon une trace de demande de construction d’usine YEMA datée de 1947[18]. Elle concerne vraisemblablement l’atelier, pour une construction ou des aménagements de locaux mais je n’ai pu en savoir plus.
Ci-dessous, reproduction d’une facture émise par la société en juin 1952, portant mention de l’adresse rue Paul Bert et du Capital social.
Facture YEMA de 1952. Détail amusant : notez l’augmentation de Capital à 6.022.720 frs
Et voici, une seconde facture de 1960. L’adresse est toujours la même. En revanche l’identité visuelle de la marque se modernise. Et le nouveau franc est entré en vigueur ! Le capital est donc désormais de 600 000 NF.
BRISTOL et CORONA
Signalons ici, dans une parenthèse rapide, que le nom d’Henri Blum est également associé à deux autres marques horlogères : Tout d’abord BRISTOL (information trouvée dans le document Syndicat des fabricants d’horlogerie de Besançon, 1789-1984, conservé aux Archives départementales du Doubs, Besançon, cote 50J en pages 5 et 17[19]. Il existe au moins un exemple de montre sous cette marque qui pourrait correspondre, en vente sur le site L’horloger de Battant[20]. J’ai contacté ce professionnel mais il n’a pas été en mesure de m’apporter plus de précisions. Il existe également une autre marque Bristol, plus répandue et américaine, cette fois. Autre hypothèse, Henri Blum a pu être importateur en France de cette marque.
Ensuite CORONA, marque créée en commun en 1966 par les dirigeants de HERMA, LOV et YEMA « pour lutter contre les circuits parallèles » (ie en dehors du circuit des horlogers bijoutiers HBJO)[21]. Cette marque ne donnera pas les résultats escomptés et sera abandonnée.
La marque YEMA
Le nom de la marque YEMA aurait été imaginé par un jeune lycéen, lors d’un concours organisé par Henri Louis Blum. Nom à consonance de lettre grecque, sans signification. A l’époque, le Grec et le Latin étaient largement enseignés dans les écoles françaises. Faut-il y voir une influence ? Le champ lexical commun avec la célèbre marque OMEGA a-t-il eu une influence comme cela est parfois évoqué ? Quoiqu’il en soit, le nom du garçon, comme les circonstances exactes de ce concours, ne sont manifestement pas passés à la postérité. Mais l’histoire est jolie. Elle est reprise à l’envie. C’est ainsi que naissent les légendes…
Une stratégie d’assembleur
Alors que son illustre voisin, LIP, leader incontestable de l’horlogerie française, mise sur la recherche, l’innovation et le développement de ses propres mouvements (chronographe exceptés), dont il vante la précision dans ses publicités, Henri Blum adopte la stratégie de l’établissage, c’est à dire l’assemblage de composants achetés ailleurs. Il utilisera notamment les ébauches suisses pour les chronographes, dont les très prisés Valjoux 92 et 72, mais aussi les calibres France Ebauches, notamment pour ses montres automatiques.
Savez-vous, d’ailleurs, que les toutes premières montres réalisées par YEMA ont aussi été des montres… LIP équipée des récents calibres T18, dont l’assemblage a été confié à la toute jeune entreprise par Fred Lip[22] ? YEMA assemblait également pour LIP des montres équipées du calibre 23D Jeambrun, destinées au USA. Les rubis, très taxés aux Etats-Unis, étaient remplacés par des paliers en bronze, permettant de proposer un prix plus bas. Le tout devait satisfaire aux critères sévères du Cetehor[22b] !
Très vite, YEMA prend une part active à la vie et à la promotion de sa branche industrielle. Ainsi Henry Blum (note : prénom écrit avec le « Y » que je vais donc conserver pour la suite), Directeur technique, domicilié Villa Calame, rue Paul Bert, et YEMA S.A., fabrique d’horlogerie, sont respectivement présents dans la liste des membres actifs et membres bienfaiteurs de la Société Chronométrique de France de janvier 1949[23].
Innovation et qualité : les clés du succès
Dès les premières années, le succès est au rendez-vous, et YEMA se distingue par son dynamisme, sa capacité d’innovation et sa grande exigence de qualité. Henri Louis Belmont présente des montres dans les concours horlogers officiels et exploite très logiquement les distinctions qu’il remporte à des fins promotionnelles.
La YEMA Miniplan : premiers succès
Le succès de la Miniplan est un bon prétexte à promotion, comme en témoigne la publicité ci-dessous, insérée dans le bulletin de l’Association des Anciens Elèves, à l’occasion du lancement de la YEMA Miniplan en 1955[24] .
Ci-dessous, photos de cette très jolie montre (33mm de diamètre hors couronne, épaisseur 7,9mm verre compris, entrecorne 16mm), capturée sur un site de ventes aux enchères, reproduites avec l’aimable autorisation du vendeur, Atelier Nouvelle Heure (pseudo nico77cechil) :
Les récompenses
En 1956 : YEMA arrive en tête du classement général annuel des montres dites « à étoile », établi par le CETEHOR (CEntre TEchnique de l’industrie HORlogère). L’entreprise recevra cette distinction plusieurs année de suite[25].
Le Cetehor est un organisme, créé en 1945 sous la double tutelle du Ministère de l’Économie et des Finances et du Ministère de l’Industrie et de la Recherche. Il a pour vocation d’assurer un service officiel de contrôle de la marche des montres, qui attribue une note de 1 à 4 étoiles à l’occasion de tests sur un échantillon de montres prélevées au hasard. Les tests portent sur la qualité de fabrication et le réglage. La note maximale de quatre étoiles correspond au fameux « Poinçon de Besançon », attestant de la grande qualité de la montre. Vous avez peut-être déjà vu ces fameuses étoiles frappées sur le fond de votre toquante préférée[26].
Toutes ces récompenses permettent à Henri Louis Belmont de promouvoir sa marque, en particuliers auprès du réseau de distribution des Horlogers Bijoutiers HBJO, dont beaucoup sont d’anciens élèves de l’Ecole Nationale d’Horlogerie, et qu’il prendra toujours grand soin de valoriser, comme le démontre la communication ci-dessous[27] :
Le temps de la croissance
Le développement industriel
Les commandes sont à la hausse. Pour faire face et tenir le rythme, YEMA optimise ses procédés de fabrication et développe le travail d’assemblage à la chaîne, notamment grâce aux outillages développés par sa Filiale SORMEL, créée en 1953, dont la direction sera confiée à Jacques Mercet jusqu’à son départ à la retraite en 1985[28]. La société est domiciliée au 67 rue des Cras à Besançon. La publicité ci-dessous[29]illustre parfaitement le fait que les produits développés étaient destinés à la vente aux entreprises et professionnels, et pas réservés uniquement à YEMA.
SORMEL à la pointe de la technique
SORMEL jouera un rôle majeur dans le succès du groupe. Citons ici un passage édifiant de la thèse de Claude Briselance[30] : « En 1952, suite à une conférence des Amis du Club de l’Horlogerie, donnée par Adolphe Trincano lors de son retour d’une mission économique officielle française effectuée aux Etats-Unis et au Canada, Henry-L. Blum comprend immédiatement tout l’intérêt que présentent les marchés encore inexplorés du Nord où la Suisse était pratiquement seule.
Avec une équipe de techniciens, tous anciens élèves des ÉNH et rompus aux méthodes les plus modernes, il conçoit un projet de fabrication spécialement adapté à l’exportation. Son idée repose sur le triptyque suivant[31] : « Une chaîne mécanisée du montage de la montre ; l’emploi d’un seul calibre (mouvement pour montre bracelet homme, avec trotteuse centrale, type spécialement américain. Production estimée 100000 montres par an, réservées à l’exportation… » […]
Les première exportations débutent en 1954. En 1957 la Société Sormel exporte ses montres aux Etats-Unis, au Canada, en Chine mais aussi en Suisse… Quant à Yema, la Société mère, elle axe aussi ses efforts sur l’exportation et pénètre les marchés de l’Allemagne de l’Est, de la Tchécoslovaquie, de l’Espagne et d’Andorre ».
YEMA international
La stratégie s’avère payante : l’entreprise reçoit en 1958, des mains d’Antoine Pinay, Ministre des Finances, le très convoité Oscar de l’exportation, avec mention d’Honneur, en raison notamment de son introduction réussie sur les marchés américain et canadien[32]. Le document cité un peu plus haut précise : « Situons tout de suite l’importance d’une telle distinction en précisant que YEMA est la seule maison productrice de montres à ancre qui ait obtenu cet Oscar symbolique ». Il est sympathique de pouvoir regarder l’archive de l’Ina de la remise de l’oscar en 1958[33]. Hélas sans son.
Et voilà comment YEMA SA devient YEMA International, et le clame haut et fort. Vous trouverez facilement sur internet des reproductions de publicités pour « La Montre à service complet Wrismaster« , qui mentionnent : « Les montres Yema de classe internationale sont les seules qui ont obtenu l’oscar de l’exportation. Leur qualité et leur précision sont donc nationalement et internationalement reconnues ». Et en pied : « New-York, Montréal, Caracas, La Havane, Madrid, Hong-Kong« . Tout un programme…
Le succès du salon Micronora de 1970
A l’occasion du salon international Micronora de 1970 à Besançon, SORMEL reçoit la médaille d’or du Label technique Section Horlogerie, Micromécanique et Micro électronique, pour « une unité modulaire d’exécution et travail élémentaire présenté dans une spécialisation de vissage automatique. »[34]Je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous cette coupure de presse qui n’apporte aucune information nouvelle, mais dont l’arrière-plan amusant témoigne de l’ancrage de l’horlogerie bisontine dans son terroir.
SORMEL séduit à l’étranger
L’efficacité des chaînes de montage SORMEL est telle qu’elles séduisent rapidement d’autres industriels, à commencer par les compagnies horlogères suisses. Le succès de SORMEL ne se démentira pas. Pour répondre à ses commandes, SORMEL se séparera physiquement de l’usine YEMA en 1976 pour s’installer dans la zone Lafayette, sur un terrain de 11000 m2.
L’entreprise survivra à « L’affaire MATRA » dans les années 80, sur laquelle nous reviendrons. Elle déclinera son savoir-faire dans d’autres univers et deviendra FSA (Fabricom Système d’Assemblage)… spécialisée dans l’assemblage automobile, et détenue par GDF Suez. FSA a été racheté en 2017 par JR Automation[35]. L’usine principale de FSA se trouve toujours à Besançon, 8-10 rue Lafayette.
Les premières campagnes de publicité
En 1959, YEMA publie ses premières annonces publicitaires dans la presse écrite : « La marque s’affiche dans Paris Match avec l’accroche « Exactitude précision », insistant sur la fiabilité́, la robustesse mais aussi sur la technicité́ de ses montres[36].
Des collections colorées, la marque de fabrique YEMA
Le support de campagne publicitaire ci-dessous (août 1968 ?) souligne l’esprit ludique et joyeux des collection YEMA, caractérisant ses créations souvent très colorées (y compris pour les modèles masculins et sportifs). Il rend justice au fait que YEMA a aussi réalisé de bien jolies montres pour femme, bien qu’elles ne soient pas aujourd’hui l’objet des recherches prioritaires des collectionneurs. Il rappelle surtout le soin qu’apportait YEMA à promouvoir la qualité technique de ses produits (« ce sont de vraies montres » ») au sein de son réseau de distribution exclusif HBJO, comme à valoriser les revendeurs eux mêmes (« Yema travaille plus que jamais la main dans la main avec l’Horloger-Bijoutier »).
YEMA fleuron de l’industrie horlogère française
En 1961, la société atteint un rythme de production de 300 000 pièces par an. La croissance du chiffre d’affaire sur les 8 premiers mois est en augmentation de… 34% par rapport à la même période de l’exercice précédent[37] !
L’usine de la rue de Cras : le navire amiral
Mais surtout, 1961 marque une étape fondamentale de la réussite et de la croissance de YEMA : la construction de son usine de pointe au 65-67 rue des Cras à Besançon.
Note : Photos issues du fond documentaire Mémoire vive de Besançon[38]. Sur la photo de la cour arrière, il possible de deviner, sous le porche, les panneaux indicateurs des société YEMA et SORMEL à l’intention des visiteurs et fournisseurs. La troisième inscription est vraisemblablement COTI, mais je ne suis pas parvenu à retrouver de trace de cette société. J’ai par ailleurs été intrigué par le camion d’où descendent les employées. L’inscription sur le flanc est difficile à déchiffrer : Caisse régionale… ? Il s’agit en fait d’un camion de la Caisse régionale de Sécurité sociale, pour la visite médicale et les radiographies[38b].
Des cartes postales d’invitation destinées aux professionnels seront éditées pour cette occasion[39]. Vous noterez que par sa signature institutionnelle YEMA international, la marque affiche clairement ses ambitions.
Voici un florilège de citations d’articles ou de documents institutionnels de l’époque :
« La nouvelle usine est là, presque achevée, et va devenir l’usine la mieux conditionnée de France. Tout a été prévu pour obtenir un conditionnement d’air intégral. Quelles que soient les conditions atmosphériques extérieures, les locaux seront constamment maintenus à la même température, au même degré hygrométrique, et l’air idéal ainsi puisé sera automatiquement filtré et lavé afin de le débarrasser des plus fines poussières. […] C’est ainsi que la société ÉTI, entreprise spécialisée dans les problèmes de ce genre, fut amenée à concevoir ce « robot » qui assurerait automatiquement le maintien constant des conditions draconiennes imposées par les ingénieurs de la société YEMA. »[40]
« Au premier étage une chaine d’assemblage fournit une production de 600 montres par jour. Cette chaîne entièrement conçue et réalisée par Sormel depuis : les postes de travail, les montages d’usinage, les convoyeurs, les vibreurs d’alimentation automatique, les boites de manutention jusqu’aux postes de contrôle (témoin tel projecteur de profil pour le réglage vsuel des ébats)… La décomposition du travail en éléments très courts permet un juste équilibre des divers postes, le temps de base avoisine 120 dmh (43 seconde). (…) »[41]
Une usine moderne à la pointe du progrès
Invité à l’inauguration de l’usine présidée par Henry-Louis Blum, Jean Millot, directeur de publication de la revue « La France horlogère » écrit[42] :
« Cette nouvelle usine […] se qualifie non sans raison de la plus moderne des pays du Marché Commun. […] occupe une surface de 2400 m2 ; la façade est constituée par des panneaux et un mur-rideau coulissant dans des châssis métallisés ce qui, éventuellement, permettra de la prolonger par la juxtaposition d’éléments semblables. Le mur-rideau comporte une partie vitrée très dégagée, grâce à l’emploi des profilés d’aluminium traité anodiquement, et une partie pleine constituée par une paroi extérieure et une paroi intérieure entre lesquelles se trouve un complexe isolant thermique. L’extérieur est protégé par un revêtement en glace Emalit, de Saint-Gobain, verre ayant subi un traitement thermique de durcissement, et comportant une face intérieure émaillée. […]
La régénération de l’air s’effectue sans aucune intervention par un processus dont la nouvelle usine offre la première application : l’air, appelé de l’extérieur dans la proportion des deux tiers est tour à tour renouvelé, filtré, lavé à grande eau, climatisé et maintenu au degré hygrométrique voulu par une véritable centrale aux multiples machines frigorifiques, calorifiques et filtrantes commandées par deux chaudières à mazout. Cet appareillage unique en France fonctionne sans la moindre intervention. »
Plus loin il décrit avec enthousiasme les chaines de travail SORMEL, avec « leur convoyeur, leurs établis en polyester disposés en quinconce et dotés d’appareil automatique et semi-automatiques »[43].
Avec une photo[44]c’est encore mieux…
Jean Millot termine son compte rendu de l’inauguration par la devise de Guillaume 1erd’Orange, dit aussi Guillaume le Taciturne, adoptée par la société : « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer »… à laquelle faisait déjà référence Henri Blum dans le numéro de janvier 1945 de la revue de l’association des Anciens Elèves de l’Ecole Nationale d’Horlogerie (voir plus haut) 😉
Pardon pour ces longues citations. Mais elles illustrent parfaitement à quel point YEMA se situait à la pointe des techniques industrielles et investissait lourdement pour l’avenir. Elle est enfin parfaitement révélatrice de l’esprit de conquête qui animait les dirigeants comme les 180 employés de l’entreprise à cette date.
Et si on visitait l’usine ?
Pour terminer ce retour dans le temps, parcourons les couloirs de l’usine grâce aux photos publiées dans l’Est républicain entre 1971 et 1978. Elles témoignent de l’ambiance qui régnait dans les locaux et permettent, en quelque sorte, de s’approprier les lieux.
L’en-tête de la grille tarifaire d’août 1968 ci-dessous fait état des différentes adresses des implantations et bureaux de représentation YEMA à cette époque, dont les bureaux de Paris au 43 rue Beaubourg et d’Alger au 143 avenue Ali Khodja.
Le bâtiment de l’usine de la rue des Cras est toujours debout, parfaitement reconnaissable malgré l’avancée en verre qui lui a été ajoutée. Il abrite aujourd’hui les bureaux de la Mutualité Française du Doubs
Remarquons, pour finir, que l’usine phare de LIP, située à dans le quartier de Palente à Besançon a été inaugurée, elle, en septembre 1962[45]. Dans les années 60, l’horlogerie bisontine avait confiance en l’avenir !
Le temps de la gloire
Croissance rapide des ventes
Les chiffres communiqués par la marque dans le dossier de presse « Yema, Maison Horlogère Française 1948 », réalisé à l’occasion de son soixantième anniversaire, complétés d’une estimation des ventes de 1960, permettent de reconstituer une courbe des ventes approximative entre 1960 et 1982[46]. Elle affiche une croissance moyenne de… 38% par an !
Les montres qui ont fait le succès de la marque
C’est au cours de cette double décennie que Yema commercialisera ses modèles les plus emblématiques, qui font aujourd’hui le bonheur des collectionneurs. Il suffit d’évoquer les noms de Superman, Yachtingraf, Rallygraf, Flygraf, Meangraf ou encore Navygraf pour que le sourire apparaisse sur les lèvres de ceux qui les possèdent… et des paillettes dans les yeux de ceux qui rêvent de passer l’un de ces modèles à leur poignet un jour. Ne sont évoqués ici que les modèles les plus célèbres, qui atteignent aujourd’hui des cotes impressionnantes sur le marché de la collection vintage.
Des stylistes designers d’exception
Les premiers chronographes de ces illustres séries ont vraisemblablement été dessinées sous la direction de Daniel Jacquinot, responsable du design Yema jusqu’à début des années 70. C’est Jean Müller qui prendra la suite à partir de 1974. Les stylistes (à cette époque on ne parle pas encore de « designers ») audacieux de l’époque n’avaient sans doute pas conscience qu’ils construisaient le mythe YEMA avec ces montres au caractère ludique et résolument sportif. Pour consoler ceux qui voient parfois, faute du budget suffisant, s’éloigner des montres devenant inaccessibles, rappelons que la richesse des collections de la marque permet encore de trouver quelques pépites moins recherchées, mais non moins intéressantes. Pourvu que ça dure !
Un marché porteur qui soutient la croissance
Il est à noter que YEMA a été porté pendant toutes ces années par un contexte général assez porteur pour l’horlogerie mondiale, notamment à l’export, très bien présenté par François Burgat en 1973 dans les premières pages de sa thèse Structure de l’offre horlogère mondiale et forme des marchés[47]. Sur la première décennie de cette période la stratégie de développement à l’international de YEMA est illustrée, par exemple, par les dépôts de brevet aux États-Unis de la Yachtingraf (brevet 3487800 Watch for yachting and underwater use déposé le 18 février 1969) et du bloque lunette de la Superman (brevet 3512353 Device for locking a turning Bezeldéposé le 10 mai 1968).
Occasion de rappeler qu’aux États-Unis, la diffusion des montres YEMA s’opère notamment sous la marque LEJOUR, dont nous connaissons les déclinaisons des modèles emblématiques (Notons, au passage, que les montres LEJOUR ne sont, à l’inverse, pas toutes des YEMA ! LEJOUR a par exemple aussi importé sous sa marque les très sympathiques chronographes HERMA Le Mans)
YEMA ne connaît pas la crise ?
Mais 68. Le temps du conflit social
La courbe des ventes met en évidence que YEMA prend parfaitement le virage du quartz dans les années 70. Il faut dire aussi que l’entreprise a lourdement investit pour s’adapter à cette révolution technologique.
Cependant tout n’est pas toujours rose dans la vie de la société. Comme ses concurrents, l’entreprise doit affronter le conflit social de 1968. Le groupe Medvedkine[48]de Besançon, signe à l’époque un documentaire militant et engagé, à charge contre la direction : Classe de Lutte. Il dresse le portrait captivant de Suzanne Zedet, salariée de l’usine YEMA, qui s’engage dans le militantisme syndical pour créer la section locale de la CGT : elle devient le leader de la contestation ouvrière au sein de l’entreprise.
Classe de lutte, un film à voir
Le film présente notamment un échange animé entre le fondateur de l’entreprise et ses salariés dans la cour arrière de l’usine. Le bras de fer tournera à leur désavantage. Suzanne Zedet sera déclassée, avec baisse de salaire. Quelque chose qui parait impensable aujourd’hui. Il serait toutefois nécessaire d’avoir d’autres informations contradictoires pour éclairer, sans doute, cette décision de la direction de YEMA. Quoiqu’il en soit, il n’y avait aucun syndiqué avant la grève. Ils sont dorénavant 30. Les grévistes n’ont pas tout perdu. Ce documentaire, distribué par ISKRA, est à voir absolument, ne serait-ce que pour le chant du générique de fin, composé pour la circonstance[49].
Au-delà d’un témoignage passionnant sur les débuts du syndicalisme et les tensions sociales dans l’entreprise à cette époque, Classe de Lutte se révèle plein de surprises et d’informations pour le chercheur amateur :
- Il y est d’abord précisé que l’entreprise compte à cette époque un effectif de 217 personnes (97 hommes, 120 femmes, hommes : 97 ; Age moyen : 30 ans), possède un capital de 3 millions de NF et réalise un chiffre d’affaire annuel de 6,5 millions de NF.
- Le papier à en-tête du moment apparait, avec un dessin stylisé de la façade de l’immeuble.
-
Et, jolie surprise, la signature des courriers adressés à la Suzanne Zedet évolue dans le temps ! Le 10 février 1965, elle reçoit un courrier signé Henry L. Blum. Le 1er Octobre 1968, le courrier qui lui adressé porte la signature de…Henry L. Belmont !
Nous avons là une illustration concrète de l’adoption par Henry Louis Blum du nom de Belmont en 1966. Il est amusant de noter que si le nom change, la signature elle, n’évolue pas. Pour l’anecdote, je n’ai pris connaissance de l’acte de naissance d’Henri Blum que bien après avoir visionné le documentaire Classe de Lutte. Vous imaginez mon excitation lorsque j’y ai découvert le changement de signature du courrier, qui me permettait de situer à quelques années près la période du changement de nom ! Notez au passage que le prénom est encore écrit sans trait d’union, dont je ne sais pas trop dater l’apparition, ni même déterminer qu’il s’agit d’une écriture adoptée par l’intéressé.
Un lecteur a eu l’amabilité de me confier une copie de courrier adressé au réseau HBJO pour le lancement de la collection de Août 1968. En couleur, l’en-tête est beaucoup plus valorisante ! Vous noterez que le soin porté par YEMA à la relation avec le réseau des Bijoutiers HBJO y est palpable et apprécierez les deux savoureux paragraphes de conclusion… non sans avoir remarqué la judicieuse exploitation des récompenses obtenues (le « Brand content » n’a rien inventé !).
YEMARGON : des mouvements conditionnés à l’argon
S’agissant de relations qu’entretient YEMA avec le réseau des distributeurs H.B.JO., je viens glisser ici une petite digression dans le fil de l’histoire pour illustrer encore le soin que prend l’entreprise à leur égard.
Pour nourrir l’image de qualité de l’entreprise, YEMA conditionne les mouvements de rechange qu’elle adresse à ses bijoutiers dans des sachets étanches remplis à l’Argon. Il s’agit d’un gaz inerte ayant la propriété de créer un environnement de conservation neutre, utilisé pour… la conservation de la viande, l’isolation thermique des doubles vitrages, ou en plongée sous marine pour gonfler les combinaison étanche (source Wikipedia). Quelle belle opération de marketing « B to B » !
YEMA se développe. Lip est dans la tourmente
Mais revenons au fil principal de ce dossier : il est intéressant de souligner qu’au moment où YEMA est en plein essor, LIP, voisin Bisontin, s’est embourbé dans une situation inextricable liée à sa stratégie de diversification historique dans l’armement et la mécanique de précision. Dans le secteur horloger, l’entreprise souffre de la lutte interne entre Fred Lip et EBAUCHES SA, entré au capital à hauteur de 25% en 1967[50]. La société plie le genoux en avril 1973 à l’issue d’un un effroyable conflit social qui a duré près de 7 ans, et qui trouve son apogée lors de la fameuse marche des 100.000 de novembre 1973.
Mais l’histoire ne s’arrêtera pas là. La décennie suivante sera marquée par de belles innovations et un design qui fait encore référence aujourd’hui (Lip Talon par exemple…). Pour mieux connaître l’aventure de Lip et « des Lip », je ne peux que vous recommander la lecture de l’excellent ouvrage de Marie-Pia Coustans et Daniel Galazzo au éditions Glénat : LIP, des heures à conter. Et si vous n’avez que quelques minutes à consacrer au sujet, choisissez de regarder le sympathique reportage réalisé pour l’émission de Stéphane Bern « Visite privées » en septembre 2016, consacré à l’histoire de cette marque et à sa reprise en 2015 par Philippe Bérard et son groupe, SMB[51].
Le temps des honneurs
La légion d’honneur
Le 4 septembre 1978, Henry Louis Belmont reçoit la Légion d’Honneur des mains du Président Edgar Faure en présence de Michel Denieul, préfet de la région de Besançon, et de représentants de l’horlogerie française et helvétique. C’est la reconnaissance du succès de l’aventure industrielle et de sa contribution à la renommée de la France dans le monde.
En 1982, Henry Louis Belmont se retire et laisse la place à son fils Henry-John. Il ne disparait pas toutefois du paysage horloger et se consacre à la recherche historique et à la rédaction d’ouvrages spécialisés.
Il publie ainsi en 1985 L’Échappement à Cylindre 1720-1950 : le Haut-Doubs, centre mondial au XIXe siècle puis, en 1993, La montre – méthodes & outillages de fabrication du XVIe au XIXe siècle : de la naissance de la montre à la période proto-industrielle
Le prix Gaïa
Henry-Louis Belmont sera récompensé pour ses travaux en étant l’un des 3 premiers lauréats du Prix Gaïa, créé en 1993, dans la catégorie « Histoire-Recherche ». Les deux autres lauréats sont André Margot (Catégorie Esprit d’entreprise) et Jean-Claude Nicolet (catégorie artisanat création)[52].
L’oeuvre d’une vie
Henry-Louis Belmont est décédé en 2002. Il repose en terre chrétienne auprès des siens, au cimetière des Chaprais, à Besançon[53]. L’incroyable épopée de l’entreprise YEMA l’a fait entrer dans l’Histoire.
Lire la suite : Partie II, YEMA une marque dans la tourmente
Notes
[1] Archives municipales de Besançon, consultables notamment sur le site filae.com – Retour
[2] Le registre des naissances de Besançon est accessible sur le site Mémoire vive de Besançon. L’acte de naissance de Henri Louis Blum se trouve en page 322. J’ai également retrouvé sa trace dans les archives en ligne de l’état civil du Doubs, dans les tables décennales couvrant la période 1903 1912 en page 24 – Retour
[3] Les sources disponibles pour rédiger cette rétrospective évoquent indifféremment Henri Blum, Henry Blum, Henry Belmont, Henri Belmont, Henry-Louis Blum avec ces différentes orthographes, sans que soit toujours respectée la logique chronologique. – Retour
[4] Les filles à l’école d’horlogerie de Besançon depuis 1917. Mémoire de Recherche de Master, Justine Durproix (26 mai 2017), Université de Franche-Comté, Besançon – Retour
[5] Actu Comtoise.info « Ancien conservatoire de Besançon, une page se tourne ». Jules Haag a été directeur de l’institut de chronométrie de Besançon, co-fondateur puis président de la société chronométrique de France et premier président du CETEHOR en 1949. source : site racinescomtoises.net ; le lycée Jules Haag a été dirigé de 1912 à 1943 par Louis Trincano, à qui les élèves de première et de terminale ont dédiée un film Sur les pas de Louis Trincano. La bande annonce permet de voir de belles image d’époque du Lycée – Retour
[6] http://patrimoine.bourgognefranchecomte.fr/connaitre-le-patrimoine/les-ressources-documentaires/acces-aux-dossiers-dinventaire/etude/d2cd2874-2c36-4efa-8af6-4dedf57beacc.html – Retour
[7] Editorial du président sortant, Henry L. Blum, Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Elèves n°43, 1957 et Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015 à l’université Lyon 2, sous la direction de Jean-Luc Mayaud – Retour
[8] Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Élèves de l’Ecole Nationale de Besançon (A.A.A.E) N°16, 1948. Compte Rendu d’élection de Henri Blum à la présidence de l’association. – Retour
[9] Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1327. Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015 à l’université Lyon 2, sous la direction de Jean-Luc Mayaud – Retour
[10] Prix Gaïa 1993, sur le site Watchonista, partenaire media officiel du prix, et sur le site de la ville de La Chaux-de-Fonds, dont le Musée International d’Horlogerie est l’organisateur – Retour
[10b] Précision apportée par Marie Pia Auschitzky lors de la première publication de cet article, et Wikipedia – Retour
[11] Parlons un peu de l’association, Henri Blum, Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Élèves de l’Ecole Nationale de Besançon (A.A.A.E.) N°1, 1945 – Retour
[12] Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1269. Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015 à l’université Lyon 2, sous la direction de Jean-Luc Mayaud – Retour
[13] Bulletins de l’Association Amicale des Anciens Élèves de l’Ecole Nationale de Besançon (A.A.A.E.) N°8 (Impressions de voyage en Angleterre) 1946, N°9 (Réflexions sur un voyage en Italie) 1947, N°17 (Editorial « Crise salutaire ?« ) 1949, N°36 (Lettre ouverte d’Adieu à l’occasion du décès d’Adolphe Trincano) 1955 – Retour
[14] Photothèque de la ville de Besançon. Les photos attribuées à Henri Belmont se trouvent dans la rubrique Histoire – Retour
[15] L’Est Républicain. 6 juillet 2013. Pont battant et Combattant. Brève signée « S.L. » – Retour
[16] Jean Millot « YEMA a inauguré sa nouvelle usine ». Article reproduit dans une message de « Charlie » sur Forum à montres. Je n’ai pas réussi, même en prenant contact avec « Charlie », à trouver la référence de l’ouvrage dans lequel a été publié ce passionnant article, p.102. Toutefois j’ai retrouvé la trace de l’imposante revue mensuelle « La France Horlogère », revue professionnelle de plus de 100 pages, destinée aux horlogers bijoutiers, et publiée par la famille et les éditions… MILLOT jusqu’en 2008. Jean Millot en a été directeur de publication. Il est fort probable que cet article soit extrait d’un numéro d’octobre ou novembre 1961. Si vous voulez en savoir plus sur cette illustre famille bisontine, je vous invite à lire l’article C’est la fête de samedi au parc des chaprais donné à la ville par M André Millot, que lui a consacré le site Vivre aux chaprais, consacré à la vie animée de ce quartier, haut lieu de l’histoire horlogère de Besançon – Retour
[17] Do you know Yema ? Document de prospection ciblant les professionnels et entreprises d’horlogerie pour promouvoir – en anglais – la collection Yema de 1961, signé Export Departement MONTRES YEMA S. à r.l. 2 rue Paul Bert – BESANCON (France). – Retour
[18] Fond documentaire du site Mémoire vive de Besançon, saisir « YEMA » dans le moteur – Retour
[19] Accès au document 50J Syndicats de fabricants d’horlogerie de Besançon – Retour
[20] Montre Bristol sur le site de vente L’horloger de Battant – Retour
[21] Document reproduit dans un Message de ChP du 01/12/2016 sur montrepourtous.org, dans le fil Herma Calypso une plongeuse des années 70, p.10. – Retour
[22] LIP des heures à compter – Marie-Pia Coustans, Daniel Galazzo – Éditions Glénat – p.27 – Retour
[22b] Témoignage en Commentaires de Monsieur André Appert lors de la première publication de cet article : « Bonsoir
J’ai travaillé chez SORMEL en 1957-58 en étant responsable du contrôle .Il sortait 300 unités par jour des chaines.Je les reconnais dans la nvelle usine.
Il y avait un tapis roulant entre les établis qui distribuait les casiers de montres.Le calibre était un 23D jeambrun.Les pièces partaient effectivement aux USA.Ce qui est amusant c’est qu’elles n’avaient…..aucun rubis qui étaient remplacés par des paliers en bronze.Le tout devait satisfaire aux critères sévères du cétéhor !!!! cerise sur le gateau…..le cadran était frappé : LIP !!!!!!je n’en ai gardé aucun exemplaire .Bien à vous. » ET « je crois que c’était la continuation des fameuses montres à 1 dollar.L’absence de rubis (très taxés aux USA) permet un prix bas .La direction ne communiquait pas beaucoup sur la question!!!!!!!!Amicalement » – Retour
[23] Annales Francaises de Chronométrie, vol. 19, pp.3-22, sur le portail de la librairie digitale de The SAO/NASA Astrophysics Data system. Ne me demandez pas comment il est arrivé là… – Retour
[24] Publicité aimablement confiée par le Lycée Jules Haag, publiée dans le n°26 du Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Elèves (A.A.A.E.) de l’Ecole Nationale d’Horlogerie, 1955 – Retour
[25] « Orly… L’aéronautique puis l’Horlogerie Française au premier rang en Europe ». Document publi-rédactionnel trouvé sans source sur internet. – Retour
[26] Se reporter à l’article très complet et documenté de « ChP » sur le forum MMPM Montres Mécaniques Passion Magna : http://www.passion51.com/t2948-le-cetehor – Retour
[27] Publicité aimablement confiée par le Lycée Jules Haag, publiée dans le N°42 du Bulletin de l’Association Amicale des Anciens Elèves (A.A.A.E.) de l’Ecole Nationale d’Horlogerie, 1957 – Retour
[28] Source : Photothèque de Besançon. Saisir YEMA dans le moteur de recherche. Reportage photos de Bernard FAILLE pour l’Est Républicain n°1176 de janvier 1985 et Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1386, Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015 à l’université Lyon 2, sous la direction de Jean-Luc Mayaud – Retour
[29] Publicité non sourcée, reproduite sur le message Yema, c’est le moment d’en parler, du 20/11/2008 par ChP sur le forum Horlogerie-suisse.com – Retour
[30] Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1325, 1326. Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015 – Retour
[31] D’après La Presse Horlogère, Août 1958 – cité par Claude Briselance dans sa thèse – Retour
[32] Dossier de Presse « Yema, Maison Horlogère Française 1948 » – Agence COGEPA – 2008 – Retour
[33] Remise des Oscars de l’exportation en 1958. Archives vidéo de l’INA – Retour
[34] Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1328. Claude Briselance. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015. Et Yema, c’est le moment d’en parler, du 20/11/2008 par Chp sur le forum Horlogerie-suisse.com – Retour
[35] Site officiel de JR Automation / Fabricom Système d’assemblage, qui fut autrefois, la société SORMEL créée par Henry-Louis Belmont – Retour
[36] Dossier de presse « Yema, Maison Horlogère Française 1948 » – Agence COGEPA – 2008 – Retour
[37] Jean Millot « Yema a inauguré sa nouvelle usine ». revue « La France Horlogère ». octobre ou novembre 1961. Article non sourcé reproduit dans une message de « Charlie » sur Forum à montres. On retrouve le chiffre de 300 000 montres produits chaque année sur une publicité pour « la montre à service complet « Wristmaster » réf 8715. Cette même publicité mentionne une gamme de « 250 modèles YEMA de 45 NF à 1 080 NF » – Retour
[38] Je remercie très chaleureusement le site Vivre aux Chaprais qui m’a fait découvrir l’existence du fond documentaire Mémoire vive de Besançon (Il suffit de saisir le mot clef YEMA pour accéder aux dossiers). Le quartier des Chaprais est celui dans lequel s’est implantée l’usine YEMA en 1961, rue des Cras. – Retour
[38b] Témoignage de Monsieur Alphonse Bourgeois, suite à la première publication de cet article. Témoin oculaire de l’époque, il habitait dans le quartier des Chaprais et deux membres de sa famille travaillaient chez YEMA.- Retour
[39] Annonce de mise en vente de la carte, trouvée sur la bourse aux collectionneurs Delcampe. Vendeur Mtt55 – Retour
[40] « Orly… L’aéronautique puis l’Horlogerie Française au premier rang en Europe ». Document publi-rédactionnel trouvé sans source sur internet. – Retour
[41] D’après Gunichard « Un groupe de professeurs techniques (du LETÉH) en visite aux établissements Yema-Sormel » in La France Horlogère en 1965, cité par Claude Briselance dans Les Ecoles d’Horlogerie de Besançon. Une contribution décisive au développement industriel local et régional (1793-1974), p.1326. Thèse de doctorat soutenue le 28/10/2015. Et Yema, c’est le moment d’en parler, du 20/11/2008 par ChP sur le sur le forum Horlogerie-suisse.com – Retour
[42] Jean Millot « Yema a inauguré sa nouvelle usine ». revue « La France Horlogère ». octobre ou novembre 1961. Article non sourcé reproduit dans une message de « Charlie » sur Forum à montres– Retour
[43] Jean Millot « Yema a inauguré sa nouvelle usine ». revue « La France Horlogère ». octobre ou novembre 1961. Article non sourcé reproduit dans une message de « Charlie » sur Forum à montres – Retour
[44] Photo consultable en ligne sur le site memoirevive.besançon.fr. Saisir le mot clef Yema dans le moteur de recherche – Retour
[45] LIP des heures à compter – Marie-Pia Coustans, Daniel Galazzo – Éditions Glénat – p.35 – Retour
[46] Dossier de Presse « Yema, Maison Horlogère Française 1948 » – Agence COGEPA – 2008. La production de 1960 est reconstituée sur la base de l’article de Jean Millot, indiquant : « Quant au département commercial, ses méthodes de prospection lui ont permis de réaliser durant les huit premiers mois de 1961 un chiffre d’affaire en augmentation de 34%sur la période correspondante de 1960 » – Retour
[47] Structure de l’offre horlogère mondiale et forme des marchés. François Burgat. Thèse de doctorat es Sciences économiques de l’université de Neûchatel – Retour
[48] Medvedkine est un réalisateur soviétique (24/02/1900 – 19/02/1989), inventeur du Ciné-train (train aménagé pour la réalisation et la production de court métrage). Son œuvre engagée et ses « documentaires de campagne tournés dans les années 1920 eurent une énorme influence sur le cinéma indépendant des années 1960 dans le monde : des groupes Medvedkinefurent créés dans beaucoup de pays d’Europe occidentale, d’Afrique et d’Amérique latine ». Les réalisateurs Chris Marker et Jean-Luc Godard furent des membres éminents du groupe Mevekine de Besançon. Source : Wikipedia. Je remercie vivement le site Vivre aux Chaprais qui m’a fait découvrir l’existence de ce documentaire – Retour
[49] Site officiel ISKRA. Il est possible de le louer le film pour une somme très modique sur https://www.filmsdocumentaires.com/films/475-classe-de-lutte – Retour
[50] Crise, restructuration et adaptation du capital industriel à Besançon. Jean-Marc Holz in Revue Géographique de l’Est, tome 21, n°1-2, janvier-juin 1981. Évolution industrielle récente de la France de l’Est pp.65-80. Signalons que le conflit social a également fait l’objet d’un article dans Paris-Match n°1266 du 11 Août 1973. – Retour
[51] Reportage LIP pour l’émission Visites privées de Stéphane Bern en septembre 2016 – Retour
[52] Pour en savoir plus sur le Prix Gaïa et son histoire et connaître les lauréats 2017, rendez-vous sur le site de la ville de La Chaux-de-Fonds, dont le Musée International de l’Horlogerie est l’organisateur du prix – Retour
[53] Information et photos des pierres tombales sur le site Geneanet. Inscription nécessaire pour accéder au contenu. Merci Mikaël M. pour l’info 😉 – Retour